Les populations de 13 villages situés à l’Ouest de la Guinée ont déposé une plaintecontre la Société financière internationale (SFI), institution du groupe de la Banque mondiale chargée du secteur privé, pour avoir financé le développement d’une mine de bauxite nocive. Les 540 plaignants affirment que la Compagnie des bauxites de Guinée, qui pilote le projet financé par la Société financière internationale (SFI), a confisqué leurs terres, détruit leurs moyens de subsistance et l’environnement local ainsi que les ressources hydriques.
Les plaignants demandent une réparation complète et équitable des préjudices subis ainsi qu’une protection contre de nouvelles violations. Ils ont demandé au conseiller-médiateur (CAO) de faciliter la médiation avec la SFI et la Compagnie des bauxites de Guinée pour examiner et traiter leurs griefs.
« Les terres sur lesquelles nous vivons et cultivons depuis des siècles ont été presque totalement consommées par la CBG », a déclaré Mamadou Lamarana Bah. « Sans terres, forêts, ni eau, comment allons-nous survivre ? »
Les villageois ont perdu leurs terres agricoles, ce qui a conduit à une baisse drastique de leurs revenus et à la détérioration de leur qualité de vie, à la restriction de leur accès aux ressources en eau, qui ont été polluées, entre autres impacts négatifs. La situation est particulièrement précaire pour les populations du village Hamdallaye, lesquelles ont été informées par la société de leur imminente réinstallation, sans leur consentement, sur une ancienne zone minière n’ayant pas été convenablement réhabilitée.
Les plaignants sont représentés par deux organisations guinéennes, le Centre du Commerce International pour le Développement (CECIDE) et l’Association pour le développement rural et l’entraide mutuelle en Guinée (ADREMGUI) ainsi que par l’organisation américaine de défense des droits de l’Homme, Inclusive Development International (IDI).
La Guinée dispose des plus grandes réserves de bauxite au monde. Les sociétés minières ont envahi le pays ces dernières années, en dépit des graves inquiétudes concernant les impacts sociaux et environnementaux qui ont déjà été soulevées par Human Rights Watch et d’autres organisations. La bauxite extraite par Compagnie des bauxites de Guinée esttransformée en aluminium, lequel est utilisé par les principales marques grand public pour la fabrication de véhicules, de cannettes de boisson et de biens technologiques. Cependant, peu de Guinéens bénéficient de ces projets d’extraction de bauxite.
« Les sociétés minières internationales tirent une fortune des riches ressources minérales de la Guinée, tandis que les communautés touchées par l’exploitation minière sont littéralement laissées sans rien, a déclaré Mathilde Chiffert, coordinatrice juridique pour l’Afrique de l’Ouest chez Inclusive Development International. « Il est grand temps que les communautés locales tirent une part équitable des avantages de l’extraction minière. »
La Compagnie des bauxites de Guinée est une société conjointe détenue par le gouvernement guinéen, la Compagnie d’aluminium des États-Unis (ALCOA), le géant minier anglo-australien, Rio Tinto, ainsi que Dadco enregistré à Guernesey. En 2016, en plus des 150 millions de dollars octroyés par la Société des États-Unis pour les investissements privés à l’étranger (OPIC), la SFI a accordé un prêt de 200 millions de dollars à cette entreprise conjointe pour que cette dernière étende ses opérations minières.
Par ailleurs, 473 millions de dollars lui ont été attribués par un consortium de banques commerciales, dont : Société Générale France, BNP Paribas, Crédit Agricole, Natixis, filiale allemande de la banque ING, ING-DiBa et deux banques guinéennes, la Société Générale de Banques en Guinée et la Banque Internationale pour le Commerce et l’Industrie de la Guinée, membre du groupe BNP Paribas.
Le gouvernement allemand a assuré une partie du financement à travers son Programme de garantie des prêts non liés.
Depuis le début de ses opérations en 1973, la Compagnie des bauxites de Guinée a exploité de vastes superficies de terres dans les environs de la ville de Sangaredi située dans la région de Boké. Pendantdes années, cette entreprise a privé les communautés locales de leurs droits fonciers, créant ainsi d’immenses frustrations au sein de ces populations.
« Nous attendons avec impatience de nous engager dans un processus de dialogue équitable avec la CBG, facilité par un médiateur indépendant, afin de résoudre leurs griefs datant de longue date », a déclaré Saa Pascal Tenguiano, Directeur exécutif du CECIDE.
Cette plainte est disponible :
En français : https://www.inclusivedevelopment.net/wp-content/uploads/2019/02/CBG_CAO_Request-for-Mediation_FINAL-FRE.pdf
En anglais : https://www.inclusivedevelopment.net/wp-content/uploads/2019/02/CBG_CAO-Request-for-Mediation_FINAL-EN.pdf
Pour en savoir plus, consultez :
« Qu’est-ce que nous y gagnons?» Impact de l’extraction de la bauxite en Guinée selon Human Rights Watch,Human Rights Watch, octobre 2018